Page 16 - Danièle Henkel
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PORTRAIT D’AUTEUR
YVES BEAUCHEMIN
« L’écriture prend du temps », affirme d’emblée Yves Beauchemin. « Je n’ai pas l’écriture facile. J’écris avec plein de ratures, j’ai plus de facilité dans les dialogues. Je me suis d’ailleurs toujours demandé pourquoi je n’avais pas écrit de pièces de théâtre... Ce qui est long pour moi, dans l’écriture, c’est la recherche du mot parfait. Mon but est que ça sonne naturel, qu’on ait l’impression que c’est comme ça que ça se passerait dans la réalité. Il y a aussi la recherche du vocabulaire spécialisé. Si je mets en scène un médecin ou un marchand, il faut que j’utilise le vocabu- laire exact qui est utilisé dans ces milieux. »
Pour son plus récent ouvrage, l’auteur a d’ailleurs rencontré deux urgentologues. « Je voulais savoir ce qu’ils font quand quelqu’un fait un infarctus, et aussi qu’ils me décrivent l’ambiance qui règne dans une urgence. En même temps, la vie m’a facilité les choses, puisque je suis allé à quelques reprises aux urgences dans ma vie. »
Son roman Une nuit de tempête est arrivé dans la tête d’Yves Beauchemin au détour d’une marche dans son quartier. « Plus tu vieillis, plus tu deviens paresseux. J’avais demandé une bourse au Conseil des arts de Longueuil, qu’on m’a accordée. Il fallait donc livrer la marchandise. Je savais déjà que ce roman allait se passer dans le Vieux-Longueuil, parce que je demeure ici depuis longtemps et que je n’avais pas de recherche à faire. Un hiver, je marchais autour de chez moi, et l’image d’un jeune qui glissait sur le trottoir et s’assommait m’est venue en tête. Je suis parti de là. Ensuite, arrivent les questions : pourquoi il est tombé, qu’est-ce qu’il fait ici, il arrive de Joliette (où j’ai passé mon ado- lescence), et s’il tombe, il se retrouve à l’hôpital... Ça s’est fait comme ça. »
SIMPLICITÉ ET AUTHENTICITÉ
L’auteur a mené plusieurs revendications dans sa vie, que ce soit la défense de la langue française ou la souveraineté du Québec, mais il n’a pas intégré de messages particuliers dans ce nouveau roman. « C’est surtout la rencontre de la jeunesse avec la maturité. Il y a le thème de la nourriture, j’adore man- ger. Le médecin de mon livre adore manger et picoler aussi. J’ai connu plusieurs médecins dans ma vie et je suis surpris que souvent, ils ne s’occupent pas de leur santé, autant phy- sique que mentale. Mais je n‘avais pas de message en parti- culier, sauf une nostalgie de la jeunesse, en vieillissant on l’a tous. Pour une fois, il n’y avait pas de message politique. »
Quand on lui demande pourquoi il écrit, un long silence emplit la pièce.
« J’ai commencé à écrire très jeune, au collège. J’ai d’abord commencé par un journal personnel vers 12-13 ans, une sorte de journal intime que j’ai encore, mais que je n’ai jamais relu. C’est un besoin d’écrire au départ, et si tu as un peu de succès, ça devient une véritable passion. Mais ça prend du courage pour écrire. »
Le succès de ses romans comme
Le matou, vendu à plus d’un million d’exemplaires, l’a poussé à continuer dans la voie de l’écriture. « Je dirais que le succès a été un encouragement. Grâce au Matou, j’ai pu laisser mon emploi à Télé-Québec. Ça m’a donné plus de temps pour écrire. Et comme j’écris très lentement, ça m’a permis d’écrire un peu plus.»